lundi 18 avril 2022

Tes premières élections

 

Mon grand garçon, tu as maintenant 19 ans et ce sont tes premières élections. C’est un moment bien particulier puisqu’en 2002, peu avant ta naissance, le visage de son père s’affichait devant nos mines étonnées.

Tu vis entouré de menaces permanentes, tu es écoanxieux, tu es déjà désabusé.

Tu n’as pas la motivation d’aller voter. Tu trouves ton président arrogant, peu à l’écoute, trop sûr de lui, de sa réélection, comme s’il s’agissait d’une reconduction tacite.

Tu ne comprends pas comment on est passés de Veil à Schiappa et de Malraux à Bachelot.

Tu lui en veux d’avoir été « enfermé »

Mais sache qu’il est là pour gouverner pas pour te plaire et c’est ce qu’il va continuer à faire.

Ton vote sans enthousiasme ne sera ni un soutien, ni une adhésion.

Tu dois sortir du déni-ni de ta génération, ne pas voter blanc parce que ça ne sert à rien et qu’aucun des candidats ne s’appelle « Blanc ».

Ne saccage pas ton école en signe de protestation.

Tu dois choisir entre « le préférable et le détestable » selon la formule de Raymond Aron.

Je sais c’est difficile de t’y retrouver, tu prends le train en marche.

Cette arrivée au pouvoir, je ne sais pas si elle est probable, mais elle demeure possible.

Elle a fait un travail colossal, elle n’est plus connue que par son prénom.

Elle a pu compter sur un allié inattendu : le paratonnerre Z devenu son marche-pied.

Le terme d’extrême droite selon les curseurs et les chaînes de télévision a été remplacé par « la droite nationale » ou « droite nationaliste ».

Mais pousse le chat installé sur son programme et lis-le attentivement.

Observe sa fascination pour les dirigeants autoritaires.

Intéresse-toi à l’histoire de son parti, à son entourage, ses accointances, son arrière-boutique, ceux qui siègent à ses côtés au Parlement européen, au gouvernement qu’elle formerait…

Papi t’a raconté son passé d’enfant caché et de réfugié qui ne parlait pas un mot de français. Il t’a expliqué comment il avait été blessé à la main gauche lors d’une manifestation contre l’OAS.

Tu vois bien, notre histoire ne peut pas croiser la sienne, nous n’avons pas les mêmes valeurs, pas les mêmes projets. Comment pourrait-elle nous représenter ?

Ne sois pas passif, dimanche ne t’abstiens pas, viens avec moi, écoute encore un peu ta mère, comme elle a souvent dû écouter son père. FF