mercredi 26 octobre 2016

Le doigt tendu ou la rentrée est-ce vraiment une formalité (suite)?

Evan comme tous les enfants de son âge même les différents, venait de faire son entrée en 6ème. Heureux d'en être arrivé là, joyeux, motivé. Depuis 2005, la loi française demande en théorie d'intégrer les enfants à particularité en milieu ordinaire. En théorie bien sûr.
Après de nombreuses hésitations et des discussions à n'en plus finir, Florence, sa mère, avait suivi son souhait d'être un enfant normal dans son collège de secteur avec les camarades qu'il côtoyait depuis la maternelle. Ils avaient appris à le connaître, ils l'appréciaient, il ne serait pas seul, il serait épaulé.
Mais là, ont aussitôt soufflé des vents contraires: une nouvelle auxiliaire de vie scolaire froide sans empathie décrétant d'emblée que '' cela allait au-delà de ses compétences '', une professeure principale assez brave mais dépassée d'entrée de jeu, une nouvelle principale du collège noyée dans la réforme avec un dénominateur commun pour tous les intervenants: la certitude d'être bienveillants, d'avoir déjà tout essayé et de tout faire de manière optimale.
Cette fameuse autosatisfaction frisant la suffisance, souvent décalée.
Elle a gangrené l'école publique depuis des décennies, un enlisement inextricable dans la médiocrité.
Elle rend impossible l'épanouissement des enfants en particulier ceux en difficultés, quelles que soient les difficultés.
Les élèves subissent, plus ou moins selon leur caractère et leurs problèmes, un système rigide, immuable et perdu d'avance mais aussi le bon vouloir individuel des différents protagonistes.
En effet, les paroles encourageantes ne sont pas innées et l'empathie et la bienveillance ne sont malheureusement pas des matières enseignées aux professeurs.
On a tous le souvenir d'un professeur qui nous a mal parlé, enfoncé, et qu'on a détesté. J'étais la bête noire de Mme P. ma prof de bio de 1ère et de terminale (ancêtre de la SVT), elle me déchirait chaque fois qu'elle en avait l'occasion.
Elle m'a dit que je ne ferai jamais une carrière scientifique.
Lorsque j'ai eu ma première année de médecine, je lui ai donc envoyé une photocopie (ancêtre du selfie) de mon majeur tendu.
J'aurais volontiers continué mes vulgarités en 6ème année après le 2ème concours mais j'ai alors appris son décès.
Les gentils et les méchants finissent de la même manière mais ne laissent pas le même souvenir. Cela ne m'a pas arraché le cœur mais je ne serais jamais allée cracher sur sa tombe...
Puis la vie a continué. J'ai essuyé d'autres mépris qui m'ont plus ou moins servi ou desservi.
Et puis il y a eu le Pr D., Grand chef de service de dermatologie dans un Grand hôpital qui m'a (enfin) apprécié. Il m'a jugé intelligente et vrai ou pas, cela m'a beaucoup stimulé. Le cerveau est une zone de travail mais aussi d'émotions.
Il m'a (gentiment) confié des travaux, publiés par la suite dans des revues internationales.
Et on ne m'a alors plus jamais dit que je n'étais pas une scientifique.
A tous les Pr D. Ceux qui vous ont aidé. Ceux qui vous ont relevé.
A toi Evan et à tous les autres dont le jour viendra.
À l'hologramme du majeur tendu (le papier aura disparu) que vous enverrez au système et à certains de ses représentants.


F

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