Mon grand garçon,
Tu viens d’avoir 19
ans.
Etre le bébé d’un
apprenti médecin n’a pas toujours été facile.
Tu as failli naître
pendant la visite d'un chef de service.
Tu as fait tes
premiers pas dans un PC infirmier.
Tu as fréquenté les
crèches de l’APHP.
Tu as beaucoup appelé
tes grands parents, papa et maman.
Tu as joué à Docteur
Maboul, devenu ton jeu préféré.
Puis tu as grandi.
Tu es devenu une
personne avec des avis, des opinions, des idées.
Tu m’as appris des
mots.
Tu m’as même annoncé
que tu étais en couple.
Tu allais vers ton
école d’ingénieurs le jour de tes 19 ans lorsque la directrice d’une agence de
mannequins t’a interpellé.
Elle t’a proposé de
faire des photos.
Tu lui as demandé,
étonné « pourquoi moi ? »
Elle t'a
répondu : « parce que vous incarnez la diversité »
Son équipe, lors du premier
rendez-vous, a tenté avec curiosité, de deviner tes origines.
De réunionnais à
cubain, tout a été évoqué.
Peut-être que cette
discussion t'a mis mal à l'aise.
Tu y as réfléchi,
interloqué.
Tu y as vu l’occasion
de t’interroger sur qui tu étais.
Souviens-toi toujours
de cette phrase : « ne regarde pas d’où tu viens, vois où tu vas,
seul importe à chacun »
Ce n’est pas Oprah
Winfrey qui a dit ça. C’est un des personnages de Beaumarchais dans le Mariage
de Figaro, un livre que tu as étudié…
On fait souvent comme
toi la confusion origine-identité.
Les origines, les
racines sont un vaste sujet.
Elles sont immuables
que tu en tires ou pas, force et fierté.
Par contre ton
identité, au sens large, elle t'est propre, elle n'est pas figée.
Elle t'appartient,
elle sera ce que tu en feras.
Tu vas rapidement
comprendre à quel point cette question de l’identité est devenue un enjeu.
Un enjeu personnel, un
enjeu politique, un enjeu de société.
Et surtout un enjeu de
liberté.
Ta maman qui t’aime. FF